Karine Michon, sans se référer à la méthode O Passo, semble adhérer à ses principes.
Je me permets d’ajouter une vidéo à cet article, d’un enfant de 2 ans, incroyablement doué pour le rythme et la musique en général.
Tout est déjà en place :
– la pulsation d’une grande régularité
– la coordination impeccable
– le geste de la frappe
– la recherche de sons différents
– la liberté et la souplesse rythmique à l’intérieur de la pulsation.
– Le chant
– Les cycles et carrures
Mon idôle : https://www.facebook.com/uniladsound/videos/632882524702557
Karine Michon 27 janvier 2014
La majorité d’entre nous a certainement profité de la période des Fêtes qui vient de se terminer pour célébrer en famille ou entre amis, au rythme des chansons de Noël traditionnelles.
À l’aube d’une nouvelle année, certains se sont risqués à prendre des résolutions et d’autres en ont profité pour faire un bilan de l’année achevée. Nous nous sommes donné la main, nous nous sommes embrassés, nous avons tapé du pied en souhaitant le meilleur à notre parenté. Et puis il y avait l’oncle Jean, dans un coin, qui n’arrivait jamais à suivre la cadence lorsque tous entonnaient une chanson et s’accompagnaient en claquant des mains! Nous avons probablement déjà vécu cette situation un jour ou l’autre. L’oncle Jean suscitait de gentilles moqueries, mais qu’en était-il vraiment? Était-il effectivement incapable de suivre le rythme? Aurait-il pu en être autrement?
Plusieurs chercheurs se sont posé la question et ont élaboré des études sur le sujet afin de parvenir à percer le secret. Cependant, personne n’est vraiment arrivé à trancher de façon claire : le sujet étant vaste et dépendant d’un grand nombre de facteurs. Henkjan Honing, professeur à l’Université d’Amsterdam aux Pays-Bas a, quant à lui, étudié la capacité des enfants et des adultes à prévoir les changements de rythmes. Grâce à l’imagerie médicale, il est parvenu à découvrir que le cerveau envoie un signal de correction lorsque les bébés et les adultes entendent des sons qui ne correspondent pas à ce à quoi ils s’attendaient. Selon cette étude, les bébés seraient donc capables de reconnaître la régularité d’un rythme, même si celui-ci change. Cette faculté auditive semble donc être innée plutôt qu’acquise et avant même de prononcer leurs premiers mots, les enfants tendent à démontrer une aptitude pour la musique. Si tous les petits possèdent cette prédisposition, comment expliquer alors que certains enfants et adultes ne réussissent pas à suivre et à reconnaître un rythme ?
Qu’est-ce que le rythme? Le dictionnaire Larousse le définit comme suit : Élément temporel de la musique, dû à la succession et la relation entre les valeurs de durée. Le rythme est vécu et ressenti différemment selon les sociétés. Dans notre monde occidental, le silence est imposé à l’enfant naissant. Cependant, celui-ci arrive d’un milieu sonore complexe où, tour à tour, battements de cœur, pas, respiration et paroles ont rythmé son existence pendant de nombreux mois. Au contraire, en Afrique par exemple, la musique revêt une grande importance et fait partie de la vie au quotidien. Quand l’enfant vient au monde, il est accueilli par des chansons et des rythmes et cette pratique l’accompagnera tout au long de sa vie. Ce peuple utilise plusieurs types de rythmes (binaires, ternaires) et les superpose, créant ainsi une polyrythmie qui berce le petit tout au long de sa vie jusqu’à l’âge adulte. Chez nous, les mélodies sont développées à partir des notes aiguës et médiums alors que pour les Africains, elles viennent plutôt des notes graves. Tout est donc réuni pour que, de leur côté, l’individu naisse et grandisse dans un environnement sonore familier qui crée une continuité naturelle avec le vécu de la période prénatale.
Tel que mentionné un peu plus haut ainsi que dans d’autres articles comme Le chant prénatal, vous connaissez?, le fœtus est entouré de sons et est capable de les entendre après seulement quelques mois de gestation. Ses cinq sens se développent les uns après les autres durant la grossesse : après le toucher, l’odorat et le goût, le fœtus découvre son système auditif, l’ouïe. Bien qu’il entende désormais les bruits et les sons, le bébé perçoit les différents stimuli depuis un moment déjà à l’aide de sa peau. Les vibrations, les mouvements et les sensations ne manquent pas de faire réagir ses récepteurs tactiles, qui se déploient rapidement durant la première moitié de la grossesse. Les interprétations qui en découlent lui permettront de découvrir son corps et son environnement. À travers ces mouvements incessants qu’il vit, le fœtus ressent ses premiers rythmes. Inconsciemment, l’enfant acquiert donc un sens du rythme qui sera cultivé ou non après la naissance.
Autrefois, la comptine avait une place de choix dans l’éducation des enfants et représentait le moyen le plus courant de transmettre le bagage culturel et musical d’une société. Aujourd’hui, nous chantons de moins en moins et cette communication socioculturelle et artistique se détériore. Étant donné que la participation de tout le corps est sollicitée dans la comptine, celle-ci permet à l’enfant d’améliorer plusieurs sphères de son développement. Que ce soit par la compréhension et l’interprétation des paroles, l’expression d’une émotion ou en faisant des gestes imageant les idées, les facultés de l’enfant sont mises à contribution. Si la musique, langage universel, était transmise naturellement comme l’est la langue maternelle, l’enfant l’assimilerait sans problème. Chanter sans se soucier des sons et de la cadence, puis peu à peu, distinguer consciemment les différents éléments, permettrait au rythme et à la mélodie de prendre vie. Rapidement, le lien entre la rythmique de la musique et celle du langage serait évident et la parole deviendrait plus fluide.
Stimuler le sens du rythme chez un enfant (et un adulte!) peut avoir des effets positifs sur son développement global. Perfectionner cette aptitude permet potentiellement à l’enfant impatient d’apprendre à se calmer et à se contrôler. La discipline, la concentration et l’organisation peuvent aussi être améliorées. Jean Piaget, psychologue suisse, énonce la théorie selon laquelle chaque individu possède son rythme propre. Nous parlons bien sûr ici d’autre chose que du rythme musical. Cependant, le rapprochement est facile à faire en y pensant de cette façon :
Le rythme est composé de ces divers éléments :
l’organisation et la structure;
l’action;
la répétition.
Regroupés dans un tout formant le rythme, ces éléments permettent à l’enfant qui développera ses aptitudes musicales et rythmiques d’établir ses premières connaissances, d’organiser son monde affectif et de construire ses relations.
Pour l’adulte, le travail sur le rythme peut être bénéfique à plusieurs niveaux. En retrouvant le contrôle de soi par la concentration et la précision, le travail sur le rythme peut aider à diminuer le stress. En mettant l’attention sur autre chose que nos préoccupations et en se concentrant à le faire, on retrouve le calme et les rythmes du corps – cœur, respiration – se synchronisent. Les personnes rigides et cartésiennes arriveront à modifier leurs fonctionnements en engageant leur corps dans le mouvement. Ampleur et force des gestes, coordination, flexibilité : le rythme implique le corps tout entier. Le rythme est aussi rassembleur. Il est apaisant, réconfortant et même énergisant de sentir qu’on appartient à un groupe qui partage le même rythme, que ce soit au niveau interne ou musical. Un travail sur le rythme, ou polyrythmie lorsque plusieurs sont pratiqués simultanément, permet de vivre des moments en groupe où respect et écoute de l’autre sont incontournables.
Améliorer son sens du rythme peut se faire avec un professeur, mais pour débuter, principalement avec les enfants, beaucoup de choses peuvent être faites à la maison à travers les activités quotidiennes. Il faut cependant porter une attention particulière au plaisir et à l’intérêt que l’enfant exprimera durant les périodes d’apprentissage. Mieux vaut rechercher la participation et l’effort plutôt que la quête de la perfection. Aussi, utiliser le corps tout entier dans l’exploration est souvent la meilleure chose à faire. Martine Boyer, auteure du mémoire La musique chez les enfants sourds, explique de façon juste les bienfaits d’un travail rythmique pour toute personne : La structuration du temps par la pratique des rythmes auditifs, la reproduction de cellules rythmiques simples fera prendre conscience à l’enfant de l’écoulement du temps et de la notion de durée.
Pour trouver le mouvement naturel : en écoutant une musique enregistrée, trouver et ressentir le rythme. Taper des mains ou marcher selon ce que la musique nous inspire. Variante : sans musique, taper un rythme dans les mains en marchant. Tentez de synchroniser les mains et les pieds.
Pour improviser : parler en séparant les syllabes des mots. Taper chacune d’elles dans les mains, sur les cuisses ou avec les pieds. Converser à deux ou à plusieurs de cette façon, en prenant soin d’alterner chacun son tour.
Pour poursuivre dans l’improvisation : demander à l’enfant d’inventer des rythmes pour exprimer la joie, la tristesse, la colère, la surprise, l’angoisse, etc.
Chanter en battant le rythme. Varier le tempo (lentement, plus vite, très rapide), etc.
Utiliser des objets sonores et de petits instruments afin de garder l’enthousiasme des petits.
Encourager les enfants (ou les adultes!) à écouter, à s’impliquer physiquement dans le mouvement et à participer avec confiance.
À la lumière de ce qui a été évoqué ici, pouvons-nous supposer que le sens du rythme s’apprend et que ce sont plutôt l’environnement, les influences culturelles et l’éducation de chaque individu qui ont un impact sur son assimilation? Ce qui semble à tout le moins évident, c’est qu’un travail sur le rythme permettra à celui qui le veut – enfant, adolescent ou adulte – de pouvoir établir pour lui-même un bel équilibre physique et mental. Gardons en tête que le rythme supporte la musique et le plus important est que la musique reste une source de satisfaction et de bien-être.
Karine Michon Musicienne, enseignante et conférencière
Détentrice d’un baccalauréat et d’une maîtrise en musique, Karine Michon est chanteuse lyrique et enseignante. Musicienne passionnée et amoureuse des enfants, elle sait transmettre sa passion avec enthousiasme. La tête débordante d’idées, elle a créé le Studio Tre Punti qui offre des activités artistiques pour enfants dont la musique, la danse, les arts plastiques et le yoga. Karine a pour objectif de participer au développement des enfants par les arts et les bonnes habitudes de vie. Sa douceur, son ouverture et son dynamisme font de ses ateliers artistiques des moments mémorables pour petits et grands.